Noailles, gorges profondes... (25)
Ouhans, petit village du deuxième plateau, blotti contre la forêt de La Main et s’ouvrant sur le val d’Usiers, est l’endroit idéal pour se ressourcer après un hiver rigoureux. Se ressourcer à la source, bien sûr, celle de la Loue !
Histoire d’eau printanière : une faible pluie commence à tomber, mouillant la pierre qui se lustre sans devenir glissante. La neige, encore bien présente par endroits, n’en finit pas de fondre. Celle du " Haut ", des sommets et des hauts plateaux, a pourtant déjà empli le réseau karstique et gorgé les canaux souterrains d‘un frais liquide, que l’on imagine sous pression. Une énergie débordante qui jaillit en un flot d’écume pour tapisser le fond de la gorge, accompagnée d’un râle assourdissant !
Sauvage et belle, malgré les quelques aménagements humains, didactique et culturelle, la source de la Loue est tout cela à la fois. L’ombre de Courbet, qui a peint la source à 14 reprises (aurait-il trouvé là l‘inspiration de l‘Origine du Monde ?), y plane tout autant que celle d’EDF et de l’histoire de l’électricité.
Après s‘être recueilli longuement devant cette cavité béante, le contemplatif aura tout loisir de laisser la place au randonneur. Nul besoin d’être oto-rhino-laryngologiste pour faire alors le tour de la gorge ! Ni opticien, d’ailleurs, le parcours épousant les formes sinueuses découpées par l’érosion, car au détour d’un méandre, même sans lunettes, Alain, Paf ! la Loue ! Impossible de la manquer !
Profitant de la caresse des premiers rayons printaniers, la nature reprend des couleurs. Son teint livide s’estompe peu à peu, les sous-bois ne demandent qu’à verdir. Pour l’instant, seules les jonquilles apportent une touche de gaieté dans un paysage encore bien austère. Inaccessibles edelweiss, celles qui fleurissent dans les gorges de Noailles ont su s’adapter, pour survivre au cueilleur du dimanche, en poussant juste au bord de l’apic.
Le sentier qui longe la rive droite se faufile le long de la paroi rocheuse, en restant en hauteur. A déconseiller aux vertigineux ! Il rejoint la RD 67, qui relie Mouthier à Saint-Gorgon, à son entrée dans les gorges. Inaugurée en 1845, sous Louis-Philippe, cette route à flanc de rocher a déjà connu son lot de martyrs, pendant sa réalisation, puis lors de spectaculaires accidents. Et derrière le parapet, il y a un gros trou, quand même !
C’est donc avec prudence que l’on poursuivra sa randonnée jusqu’à proximité du village de Mouthier, pour bifurquer sur la gauche juste avant la centrale hydro-électrique. Plongeant alors par un petit sentier jusqu’au fond de la gorge, délaissant la grotte des Faux-Monnayeurs et la source du Pontet sur la gauche, on poursuivra au fil de l’eau jusqu’à retrouver la Loue proprement dite et la traverser grâce à un pont métallique avant de remonter en direction de sa source par la rive gauche.
Un parcours humide, sans réelle difficulté, mais qui exige une certaine prudence. A privilégier par une chaude journée printanière ou estivale, pour y trouver un havre de fraîcheur.
Prévoir 2 heures 50 de marche pour un tour des gorges de Noailles, d’après les pancartes, même si je l’ai parcouru en tout juste deux heures, sans forcer ! Et en prenant le temps de faire quelques clichés, malgré la pluie qui tombait ce jour-là ! Peut-être est-ce aussi à cause de cela que je me suis dépêché d’arriver !
Olif, mars 2005