Le Maquis du Lomont (2) L’attaque du 6 septembre 1944

, par  Eustache

Ce texte est tiré d’un ouvrage collégial, écrit de 1992 à 1994 par les classes de CM1 & CM2 de l’école de Montécheroux : "Montécheroux de A à Z"

(localement en librairie et sur demande à l’école du village)

M comme Maquis

(suite)

Le lendemain de l’attaque du 22 août, de nouveaux résistants arrivent en masse dans la vallée. C’est la montée en masse au Lomont.
Le maquis s’étend, s’élargit, occupe le Fort du Lomont, englobe Montécheroux, où le P.C. s’installe.
Le "Commandant Paul" (Foegle) organise difficilement le maquis à cause du nombre considérable de partisans (on parle de 3000) et du manque d’armes.

Le 6 septembre, le maquis du Lomont doit soutenir une nouvelle attaque allemande, également décrite dans l’ouvrage du Commandant Harnisch.


L’attaque du 6 sepembre

Campement du Maquis à Villars, au matin de l’attaque

"Le 6 septembre, à 13 heures, Montécheroux signale au PC de Villars-les-Blamont, des chars allemands sur la route de Pont-de-Roide / la Crochère (la D73).
Où vont-ils ? Montécheroux ? Villars ?

Deux sections de la 7ème compagnie sont immédiatement embarquées sur camions, prêtes à intervenir au point de choc, encore imprévisible.
Très rapidement les effectifs en ligne sont doublés par les éléments au repos.

La 9ème Compagnie, incomplètement armée, envoie aux emplacements de combat, des hommes munis de fusils disparates : la section de Blamont renforce le point d’appui de la route principale.

Vers 14 heures, Villars appelle Pierrefontaine. Mais précisément, les Allemands occupent déjà la poste et la réponse de la téléphoniste embarrassée, on le conçoit, nous renseigne assez sur ce qui se passe là-bas.

Les deux camions de renfort sont immédiatement dirigés sur le point d’appui de la route nationale. Une section de la 8ème compagnie est envoyée en réserve non loin d’une "loge" où se constitue un dépôt de munitions. (PC de combat du Bataillon)

Un jeune F.F.I. fort leste, échappé par miracle des mains des Allemands à Pierrefontaine, vient confirmer leur présence et nous renseigne.
Ceux-ci nous laissent encore le temps de préparer les bouteilles d’essence et les "plastic" destinés aux chars, s’ils viennent.
La ligne entière attend. Tous sont prêts, résolus, "invisibles et présents". Le silence est total.

Vers 15 heures, dans la quiétude de ce bel après-midi de septembre, s’élève soudain le grondement puissant des moteurs, et les blindés surgissant de Pierrefontaine, foncent vers Villars. Des chars "Tigre" restent en appui au cimetière de Pierrefontaine.

C’est la "Gespensterbrigade" (brigade fantôme), dont les véhicules portent, peinte sur le blindage, une mort allégorique brandissant un glaive.
Les blindés approchent. Pas un coup de fusil, tout reste calme et tout apparaît vide à l’ennemi.
_Le premier blindé est à cent mètres du point d’appui, quatre-vingts mètres, soixante-dix mètres !

Blindé allemand renversé

Explosion, fumée : un bazooka vient de tirer, l’appareil défensif, à la même seconde se déclenche tout entier, et d’un bloc, toute la ligne crépite d’un feu violent.
La surprise de l’ennemi est complète, son premier blindé est culbuté, chenilles en l’air !
7ème et 8ème compagnie s’en disputeront l’honneur.

Le tir légèrement fichant des armes automatiques doit faire des ravages dans les blindés transporteurs découverts, dont l’ensemble reflue, moteurs affolés, vers Pierrefontaine : les véhicules ennemis dégouttent de sang.

Mais les chars du cimetière commencent leur tir, canonnant nos lignes, causant des pertes : cinq tués, sept blessés. Les abris, tout insuffisants qu’ils soient, nous épargnent des pertes beaucoup plus graves.

Le tir ennemi se prolonge, décapite les arbres, ajoute des fenêtres aux loges à bétail, mais laisse impassibles les hommes.
Une petite patrouille d’un point d’appui (chemin du Bois-Lessus) descend même à Pierrefontaine tenter un téméraire coup de main sur un char. Prise sous le feu à courte distance, elle se plaque au sol, et ne peut rentrer qu’à la nuit venue, ramenant un blessé.
Peu à peu, le calme revient. Le soir arrive doucement. Le Lomont nous reste !

Cette magnifique journée s’en va dans le crépuscule de victoire.
Elle sera marquée encore par un grand événement : Tandis que les lignes respirent e reconstituent leurs stocks de munitions, que des curieux inventorient le contenu stupéfiant du blindé allemand - officié tué, armes, poste-émetteur, fusée, pharmacie remarquable, coffres à vin, etc... - une clameur formidable monte derrière nous, jaillie de Villars...

Char français sur la route de Villars

Et nous voyons arriver bientôt, couverts de fleurs, automitrailleuses et chars destroyers de l’Armée d’Afrique.
Nous avions oublié qu’ils approchaient, nous ne les savions pas si proches.

La minute est émouvante, mais il suffit d’une minute d’effusions : la tâche reprend.
Une patrouille est poussée en reconnaissance vers Pierrefontaine. La section de Blamont la fournit spontanément.

Le lieutenant Sylvestre - commandant la 7ème compagnie - qui vient de perdre un fidèle compagnon tué dans l’après-midi et veut le venger, prend la tête du petit groupe.
Il est tué devant le cimetière de Pierrefontaine.

En même temps, une pluie d’obus s’abat sur le village. C’est une nouvelle surprise.
L’artillerie de la Première Armée est déjà là.
Sa présence marque la fin de la période ’Maquis’.

La nuit est tout à fait venue. Les cloches de Villars sonnent ; une foule nombreuse se presse à l’église : couchés côte à côte, drapés de tricolore, leurs pauvres brodequins dépassant des civières, nos morts reçoivent l’émouvant hommage du coin de terre que leur sacrifice a sauvé."

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(1ère partie : l’attaque du 22 août)

Jacques Mathiot, que j’ai rencontré, m’a fourni quelques uns de ses documents et d’autres précieuses anecdotes... Il était ce jeune résistant qui échappa aux allemands qui le tenaient en joue et réussit à rejoindre et renseigner les maquisards.